Le temps était lourd. Pas de nuages, de toute façon ils étaient rares dans cette région, pas de vent, lui aussi se faisait rare actuellement. Une porte claque, des cris, des hurlements même. Une ombre s'élève sur le pas de cette porte, encapuchonnée, elle s'avance tranquillement. Ses pas semblent difficiles. Si l'on observe de plus près, l'on aperçoit qu'elle boîte un peu.

Une boule de paille perturbe légèrement cette vision tranquille. L'hombre se nomme Haru Hayate et il est Jônin du village de Suna. Ses blessures ? Il ne les doit qu'à lui même. Elles sont la conséquence de son utilisation excessive d'une technique interdite. Utilisation effectuée au cours de la révolution à laquelle il vient de participer. Résultat des courses il se retrouve obligé de se trimbaler avec des béquilles. Béquilles qu'il refuse, causant donc la dispute et les cris, ainsi que son départ précipité de la maison.

Quelques jours ont passés depuis la fin du conflit. La victoire est revenue aux troupes rebelles, l'ancien Kazekage est désormais écarté et son remplaçant n'est autre que le chef de la rébellion d'alors. Xaldin Chinmoku. Haru, lui, n'avait pas pu mettre les pieds à l'extérieur du village depuis son hospitalisation. Il avait bien réussi à s'évader de l'hôpital afin de voir le discours du nouveau Kazekage mais, malgré de multiples efforts, il n'avait jamais pu s'évader complètement et se retrouver seul plus d'une heure. Sa famille, et paradoxalement celle des Hanabusa, avait fait renforcer la protection autours de sa personne afin de ne prendre aucuns risques.

« Qu'ils essaient encore de m'enfermer. J'en peux plus moi ! Ils peuvent pas comprendre que j'ai besoin d'espace ?!»

Hurlant sa haine contre cette surprotection, le gamin des Hayate décida de s'asseoir, le dos posé contre un mur. Il était enfin tranquille. Fermant les yeux, il se concentra et LA repéra. Apparemment sa famille l'avait envoyé. Profitant du lien entre eux, ELLE avait pu le retrouver extrêmement rapidement. Lorsqu'il ouvrit les yeux, elle était bientôt sur lui, le regard ferme, comme à son habitude, et habillée d'une façon très provocante, comme d'habitude aussi.

« Ils se mettent à m'envoyer une escorte girl maintenant ? Désolé, j'suis pas intéressé.»

Il se releva, grimaçant lorsque ses muscles se contractèrent. Aki Hanabusa se tenait face à lui.

Le speech de Xaldin d'il y a quelques jours fut sa dernière apparition en public. Depuis, plus personne n'entendait parler d'Aki, pas même la bibliothécaire.
En effet, elle se cloîtrait chez elle, ressassant continuellement cette journée d'horreur. Quarante cinq est devenu un chiffre maudit. C'est le nombre de Sunajin qu'elle avait tué de ses mains ce jour là. Avec Haru, le duo dépassait sûrement la centaine de victime...

Bien qu'ils avaient été contre la rébellion, Aki ne pouvait les considérer comme des ennemis. Elle avait grandit parmi eux, certains étaient ses voisins. Pire encore, elle avait tué elle-même les parents d'un de ces enfants avec qui elle adorait jouer au cerf-volant. Elle les connaissait bien et cette nuit là, ils n'avaient pas hésité une seule seconde... Alors que le couple fonçait sur elle, la Hanabusa avait fermé ses poings en hurlant de toutes ses forces. Une véritable nuée de marionnettes les avaient littéralement déchiqueté, réduisant leurs vêtements, puis leur peau ainsi que leur chair en lambeau.

Chaque nuit, elle revivait cette scène et chaque nuit, elle se réveillait en étouffant sous le poids de la culpabilité. Cette rébellion était-elle le bon choix ...? Valait-elle la mort de gens honorables ...? De quel droit pouvait-elle arracher une vie simplement en fermant la main ?
En devenant Shinobi elle s'était résignée à devenir une tueuse. Mais jamais elle n'aurait pensé devoir tuer des gens qu'elle aimait.

C'est son père qui vint la sortir de la torpeur de sa chambre. Haru venait apparemment de fuir ses appartements et elle était la seule à pouvoir le retrouver. Elle ne répondit pas à son paternel, restant cachée dans son lit qu'elle n'avait pas quitté depuis trois jours.
Elle se décida à bouger une petite demi-heure plus tard, maudissant son binôme de la forcer à sortir.

- Une heure plus tard -

Elle le trouva là où son instinct l'avait guidé, comme si c'était une évidence. Il n'était pas si loin de la résidence des Hayate finalement, mais personne ne penserait à venir le chercher dans une si petite rue.

« Ils se mettent à m'envoyer une escorte girl maintenant ? Désolé, j'suis pas intéressé. »

Sa remarque la blessa bien plus que les autres fois. Elle se contenta de ne pas répondre, elle n'en avait de toute façon pas la force. Deuxième pique lorsqu'elle remarqua la grimace d'Haru. Elle pouvait le protéger de leurs ennemis, mais pas contre lui-même et elle s'en voulait malgré tout. Peut-être que son père avait raison finalement, peut-être n'était-elle pas assez forte pour ce monde.

« Je... pardon Haru... je suis désolée... »

Elle tomba à genou devant lui, créant un tourbillon de cheveux roux qu'elle n'avait pas eu le courage de lier avant de partir et explosa en sanglot, ne pouvant plus contenir la douleur qu'elle retenait depuis la bataille.

Les blessures d'Aki n'étaient pas visibles, mais elles étaient aussi profondes que celles d'Haru.

Le Jônin ouvrit grand les yeux lorsqu'il vit sa comparse tomber à genoux devant lui et éclater en sanglots. C'était bien la première fois qu'il voyait Aki, son amie d'enfance malgré les divergences, exprimer ouvertement sa douleur et craquer à ce point. Cette vision le choqua quelques instants. Tellement qu'il en resta bouche-bée, les yeux écarquillée. Ce n'était pas possible ! Il connaissait la pression qu’exerçait les Hanabusa sur leur fille. D'ailleurs, il la comprenait même mieux que personne car il vivait la même chose.

Se retournant pour ne pas la voir pleurer, il s'aperçu qu'un gamin observait son amie pleurer. Fermant les poings il se dirigea vers lui et lui ordonna de partir sans demander son reste et sans parler à quiconque de cette situation. Sous peine, évidement, de représailles à la hauteur de la désobéissance. Il avait beau se disputer sans cesse avec Aki, personne d'autre que lui ne pouvait savoir que la jeune fille venait de craquer moralement. Ses parents feraient tout pour l'empêcher de retourner au combat. Et sans elle, jamais il ne s'en sortirait.

Retournant vers sa comparse, il l'attrapa par les épaules et la posa sur son épaule avant de sauter afin d'atteindre le toit le plus proche. Pendant sa « mise à l'écart » il n'avait fait que travailler sur la force de ses bras, et le résultat était à la hauteur de l'acharnement dont il avait fait preuve. Remettant, il lui fit lever la tête pour lui faire observer les alentours.

Musique d'ambiance:

« Aki. Tu vois ceci ? Ce calme ? La tranquillité du peuple ? Nous sommes les protecteurs de ces lieux et nous en sommes les garants. Mais rien n'aurait été possible sans toi ! Sans toi je m'en serais peut-être pas sorti vivant du combat contre la salope du sable. Crois moi que ça me coûte de te dire ça. Mais celui qui doit s'excuser c'est moi.. »

Il marqua un temps d'arrêt, afin qu'elle puisse enregistrer et sécher ses larmes.

« .. Je ne m'excuse pas pour le combat que l'on a dû mener. Je m'excuse pour les prochains que nous mènerons. Car je ne pourrais pas me retenir. Je sais que c'est mon état qui te déprime. La pression de ta famille est aussi excessive. Mais tu dois être forte. Car je sortirais souvent mal en point de nos combats, car nos familles n'arrêterons jamais d'exercer une telle pression. On demande toujours plus à ceux qui sont capables de plus. Et malheureusement nous sommes les deux génies de ce village. Alors il faudra t'y habituer. Habitue toi à me voir foncer dans le tas pour combattre. Habitues toi et adapte toi, invente de nouvelles stratégies afin de me protéger. C'est notre fardeaux. Et le tiens est plus grand que le miens. Car de nous deux, c'est toi la plus intelligente. »

Il regarda à son tour les alentours. Ce décors était sûrement l'endroit le plus beau du monde. Il valait donc tous les sacrifices possibles.

« Alors sèches tes larmes et devient forte. Maintenant dis moi.. Il se retourna vers elle afin de la regarder.. Que penses-tu de Xaldin ? »

Elle se laissa embarquer sans opposer la moindre résistance. Bien que le contact physique fut un peu brusque -se faire ballotter comme un sac à patates c'est jamais très marrant non plus, la Kunoïchi du sable l'apprécia à sa juste valeur, car c'était rare qu'Haru s'avance vers elle.
Quand il la reposa sur le sol, elle s'efforça de rester debout malgré la fatigue et de sécher ses larmes. Heureusement, elle n'avait pas pris la peine de se maquiller non plus.
Elle buvait les paroles de son ami, se sentant lentement réconforter par ses propos. Bien sûr que ce combat en valait la peine, pour le bien du pays, le sacrifice était nécessaire. Il fallait bien qu'un jour, quelqu'un se décide à porter le fardeau d'une guerre interne. Xaldin et tous les ninja l'ayant suivi sont les sauveurs d'un village qui courait à sa perte. Mais hélas cet état de fait ne faisait pas l'unanimité, et des gens sont mort à cause de ça.

Aki détourna le regard, elle était gênée qu'il la dévisage ainsi, avec les joues luisantes de larmes vaguement essuyées du bout des doigts.

Ce qu'elle pensait de Xaldin ? Elle même n'en savait trop rien en réalité. C'était un vieil ami du duo, mais Xaldin était un Chinmoku. La famille la plus renommée du village, mais surtout la plus secrète. Presque aucun écrit ne parle d'eux et ceux qui en parlent sont dans les archives. Au delà de son héritage, c'était un personnage haut en couleur et intelligent avec qui elle aimait parler. Et puis ses talents en Genjutsu étaient totalement impressionnant. Au delà de ce que pouvait accomplir un ninja lambda.

Elle aurait bien voulu dire tout ça à Haru, mais elle avait les lèvres encore tremblantes et la gorge serrée. Aucun son cohérent n'émanerait de sa bouche pour l'instant et à vrai dire, elle se fichait un peu de tout ça à ce moment précis.
Afin de mettre un terme à son propre silence de plus en plus pesant, elle fit un pas vers le Hayate afin de venir se blottir contre lui et de cacher son visage en posant sa tête contre son torse.

La Plume sera forte un jour. Mais pour le moment elle avait besoin d'un peu de calme avant la tempête à venir.